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C’est l’histoire d’une tisane…


Sureau noir (Sambucus nigra) dont on ramasse les fleurs pour les tisanes (Ne pas confondre avec le Sureau yèble)

Déjà quatre mélanges de la gamme l’Artisane… cela ne semble pas grand chose et pourtant le travail en amont est conséquent. Récolter, faire sécher puis assembler les plantes autorisées (voir l’article quand l’herboriste marche sur des œufs), mettre en sachet et enfin étiqueter. Ce sont toutes ces étapes qui font la qualité d’une tisane vivante et qui justifient aussi son prix !

On nage vraiment en plein artisanat... normal, vous me direz ? Et oui, on est dans un atelier…


Accrochez-vous !


Première étape : récolter les plantes à tisane

Chaque cueilleur de plantes a ses endroits de prédilection. J’ai donc évidemment les miens, terrains privés (il faut obtenir les autorisations des propriétaires) ou publics. Je veille toujours à prélever dans un endroit dépourvu de pollution (mes détracteurs me diront « la pollution ne se voit pas ! » certes, mais avec un minimum de bon sens, on peut s’en sortir). Les différentes parties de plantes se ramassent quand elles sont à leur « apogée botanique » (quand elles sont prêtes à être récoltées), plutôt en fin de matinée après l’évaporation de la rosée du matin et dans l’idéal, quelques temps après une pluie qui les aura un peu nettoyées.

Le moment est arrivé : la partie de la plante qui m’intéresse est à point et il ne faut pas traîner. Par exemple, les fleurs de Sureau noir doivent être ramassées assez vite car elles sont prêtes d’un seul coup et le restent peu de temps. Selon les régions, les maturités varient… En clair, chaque plante a son moment ! Donc, je me tiens prête sans cesse : j’ai toujours des contenants, un sécateur, des gants à portée de mains pour improviser la cueillette sauvage !

Enfin, je note toujours où et quand j'ai ramassé la plante. C’est très important pour le suivi des lots.


Deuxième étape : faire sécher les plantes avec soin et attention

On fait sécher les plantes fraîches naturellement en les mettant sur des claies*, en séparant les espèces et les parties de plante. Une claie est un plateau qui sert à disposer des choses que l’on veut conserver, déplacer ou transformer... On en trouve sous forme d’étagères en bois qui ressemblent à des grands frigos (pour faire simple). On peut aussi utiliser des cageots très propres. On répartit donc les plantes sur ces plateaux : il ne reste plus qu’à les surveiller de temps en temps… la durée de séchage varie d’une région à une autre, d’une plante à une autre, d’une partie de plante à une autre et enfin d’une pièce de la maison à une autre ! C’est pourquoi je parle d’observation car les conditions varient beaucoup et surveiller les plantes fraîches qui sèchent est donc la meilleure solution. Mais au fait je surveille quoi ? La couleur de la plante, les petites bêtes, le taux d’humidité… Et si le séchage est loupé comme avec une plante qui aurait inhabituellement noirci, je dois la jeter : dans ce cas, ce sont des heures de travail qui partent dans la cheminée ou au compost.

Une fois sèches, je veille à stocker les plantes destinées aux tisanes dans un endroit adapté : au sec et à l’abri de la lumière. Et je continue à bien référencer les lots (date, lieu) pour faire tourner le stock et rester dans la qualité.


Troisième étape : assembler les plantes avec prudence et talent (!)

Avec mes connaissances herboristes, j'assemble les plantes entre elles… ainsi avec une tisane de 5 à 7 plantes associées en synergie, on agira sur tel ou tel système biologique (système digestif, système nerveux, système musculaire…). C’est un vaste sujet ! Hélas, ce n’est pas l’objet de cet article, nous y reviendrons une autre fois.


Mais cette étape mérite, malgré tout, d'être précisée... avec deux idées majeures : le choix de la partie de plantes à assembler en tisane et sa "manipulation".


Les parties de plantes que je vais associer sont volontairement laissées les plus "entières" possibles car je cherche à conserver au maximum leurs qualités physiques (goût, principe actif, qualité de conservation). De manière générale, moins manipulées (soit par les mains, soit par une machine), les plantes sèches conserveront mieux leur vitalité… contrairement à des tisanes dites « en miettes », c’est-à-dire broyées par des mixeurs industriels qui réduisent les plantes en « poussière » et qui les déstructurent. C’est ce qu’on trouve dans les sachets individuels de tisane. Bien sûr, je ne casse pas de sucre sur ces produits : ils sont très pratiques mais la plante est réduite en poudre et perd donc en qualité. De plus, on ne sait pas vraiment quelle partie de plante a été utilisée : est-ce de la feuille ou du bois ?

Illustration : prenons l’exemple du Frêne élevé. La partie utilisée en herboristerie est la feuille ou plus précisément la foliole (la petite feuille). La feuille de frêne est dite composée car formée de plusieurs folioles. Contrairement à une feuille de tilleul qui est dite entière car le limbe* est entier (et en forme de cœur). Quand je glane le frêne, je récolte et je fais sécher la feuille composée entière (le gag !). Une fois sèche, je dois trier les folioles (seules parties qui serviront à la tisane, si vous me suivez bien) et pour cela, j’enlève tous les pétioles. On dit que j’enlève le bois, c’est-à-dire les parties un peu plus ligneuses. Certes, ces parties plus lourdes auraient plus de poids dans le sachet mais ce n’est pas mon but ! Moi je recherche la vertu de la plante qui est plutôt dans la partie feuillue que dans la partie « tige ». Et vous comprenez bien alors qu'avec une tisane "en miette", on y voit que du feu : tige ou feuille broyée, c’est tout « bénef » !